L’Université de New York est une université privée américaine. Son campus principal est situé au cœur de Manhattan. Fondée en 1831 par Albert Gallatin, elle est rapidement devenue la plus grande université privée du pays, avec plus de 400 000 étudiants accueillis chaque année. L’Université de New York dispense un enseignement d’excellence dans de nombreuses disciplines telles que l’art, les sciences, la médecine ou encore le droit et le commerce. Avec ses 15 facultés, elle requiert une gestion administrative importante pour organiser ses activités d’enseignement et de recherche.
NYU est connue et reconnue dans le monde entier pour la qualité de son enseignement et l’excellence de ses professeurs. Sa devise «Perstare Et Praestare», persévérer et exceller, témoigne de son engagement envers ses étudiants et de son désir de tendre vers la perfection. Parallèlement à son activité d’enseignement, l’université développe des activités de recherche qui contribuent à la consolidation de sa renommée.
L’une des spécificité de l’Université de New York réside dans son rayonnement international, soutenu par le développement de nombreux programmes d’études à l’étranger. Ainsi, l’université a crée des campus universitaires dans plusieurs villes du monde entier, de Florence à Abou Dabi, en passant par Shanghai et les grandes capitales européennes à l’instar de Paris.
En 2014, le campus parisien de l’Université de New York a posé ses bureaux au cœur du Quartier Latin, centre historique et intellectuel de la capitale, après avoir occupé un hôtel particulier dans le XVIème arrondissement pendant 40 ans. Sur ce campus, «la ville est devenue la salle de classe», et offre de nombreuses opportunités d’enrichissement de l’enseignement au travers de sorties culturelles.
Le programme parisien est spécialisé dans l’enseignement des langues, de l’art, de l’histoire et de la littérature. Il familiarise également les étudiants avec la politique de la France et ses relations avec le reste du monde.
Ce campus en pleine croissance voit grandir en son sein de nouvelles obligations. Parmi elles, NYU a été contrainte de créer un département de gestion des ressources humaines en 2014 afin de répondre aux nouvelles problématiques que l’agrandissement de la structure avait fait émerger. La création d’un tel département constitue un objet d’étude particulièrement intéressant et aux multiples enjeux. Nous allons notamment nous intéresser aux modalités de l’élaboration d’une toute nouvelle stratégie de gestion des ressources humaines et au dilemme qui se pose entre préservation de la culture familiale et création d’une véritable culture RH.
Diagnostic externe et diagnostic interne: NYU Paris et son environnement. L’éducation, et plus particulièrement l’enseignement supérieur privé est un secteur d’activité très particulier. Il faut avoir conscience de la spécificité du produit et donc de la singularité des pratiques de gestion des ressources humaines qu’il faut mener. En effet, dans ce secteur, on a à faire à une population qui n’a pas de management, personne ne manage les professeurs, ils sont libres d’enseigner comme ils le souhaitent au sein de leur classe. Parallèlement, cette population n’a pas de réelle connaissance du droit social, et ne connait de ses obligations et de ses droits que ce que la presse en véhicule. Elle a de ce fait de gros fantasmes par rapport à ce que sont les ressources humaines et ce qu’elles peuvent faire ou non. Enfin, si dans des grandes entreprises industrielles ou de services, on a tendance à raisonner en termes de groupes de salariés; les ouvriers, les cadres, on ne peut pas faire de même pour les professeurs. En effet, pour 50 professeurs, il y a autant de situations différentes, selon ce que l’on enseigne, selon son ancienneté, selon son origine ou encore selon que l’on enseigne par passion ou par nécessité. L’ensemble des caractéristiques spécifiques au corps professoral nécessite une gestion des ressources humaines tout à fait singulière et adaptée à ces spécificités.
Afin d’appréhender la spécificité du marché de l’enseignement supérieur privé, et plus particulièrement celui des programmes américains implantés en France, il peut être intéressant d’appliquer un modèle adapté des 5 forces de Michael Porter [1], au service d’une analyse en termes de gestion des ressources humaines. Ces 5 forces permettent d’évaluer l’attractivité du secteur et d’identifier les facteurs clés de succès qu’il faut maitriser pour s’y imposer. Avant de l’appliquer à l’étude du secteur de l’enseignement privé, il convient d’en adapter certains facteurs. Ainsi, les consommateurs correspondent ici aux élèves, tandis que les fournisseurs sont les professeurs offrant leur connaissance:
1. Pouvoir des consommateurs (Dans l’enseignement supérieur privé, notamment dans les programmes américains, les élèves sont considérés comme de véritables clients. En effet, ils déboursent des sommes considérables afin de suivre les programmes proposés c’est pourquoi les établissements s’attachent à veiller à leur satisfaction. Les élèves possède un pouvoir de négociation assez important vis-à-vis des établissements);
2. Pouvoir des fournisseurs (Sur ce marché, ce sont les professeurs qui tiennent lieu de fournisseurs en offrant leur expertise. Et si pour certaines matières, ils sont nombreux à se disputer les postes, pour d’autres les établissements connaissent des difficultés à les pourvoir. Ils sont souvent peu nombreux à proposer un niveau d’expertise suffisant sur un module d’enseignement très spécifique. Ils détiennent de ce fait un véritable pouvoir de négociation vis-à-vis de leurs potentiels employeurs qui ont parfois très peu de choix);
3. Forte intensité concurrentielle (Le marché de l’enseignement supérieur est un marché mature et atomisé sur lequel la concurrence est très développée. En effet, l’association des programmes universitaires américains en France (APUAF) recense près de 60 programmes dans toute la France dont la moitié à Paris. Ce chiffre ne cesse d’augmenter et chacun d’entre eux bénéficient de la notoriété de leur siège aux Etats-Unis. Les forces en présence sont donc très équilibrées ce qui renforce l’intensité concurrentielle et ce d’autant plus qu’il leur est très difficile de se différencier);
4. Opportunités de nouveaux entrants (Il existe de nombreuses barrières à l’entrée sur ce marché qui vont de l’investissement initial qui est nécessairement conséquent à l’accès à des professeurs très qualifiés qui sont rares dans certains domaines. Cependant, ces barrières n’entravent pas l’entrée de nouveaux programmes car ces derniers sont soutenus par d’importantes structures et bénéficient ainsi de leurs ressources tant financières qu’humaines, de leur réseau et de leur renommée. Ainsi, de plus en plus de grands établissements américains lancent leurs propres programmes en France);
5. Menace de produits de substitution (Les programmes universitaires américains en France font également face à une menace importante de produits de substitution. Tout d’abord de la part des établissements privés français, notamment les écoles de commerce, qui ne cessent de s’angliciser. Mais la menace de produits de substitution émane également de l’enseignement public. En effet, les universités françaises s’imposent comme des concurrents indirects de plus en plus sérieux, en proposant des programmes similaires pour des prix bien inférieurs).
L’essor des programmes universitaires américains en France a fait naitre un véritable marché de l’enseignement supérieur privé. Ce marché est caractérisé à la fois par une intensité concurrentielle très élevée [2] mais également par une source d’opportunités inépuisable, il reste de ce fait très attractif pour les établissements qui souhaiteraient créer des programmes à l’étranger et ce malgré le nombre de programmes déjà proposés. Il est donc aussi difficile que nécessaire pour les établissements américains de se distinguer sur ce marché atomisé. L’un des facteurs clés qui forgent le succès des programmes universitaires américains est sans conteste l’image d’excellence qu’ils véhiculent. En effet, nombre d’entre eux ne sont que des programmes satellites de grands établissements américains connus et reconnus dans le monde entier, à l’image du Boston College in Paris ou encore de la New York University de Paris. De ce fait, ils bénéficient de leur nom, de leur soutien financiers mais également de leur réseau et de leur renommée. Parallèlement, ces annexes françaises se doivent de correspondre au niveau d’excellence affiché par leur siège américain car le nom affiché au-dessus de leurs portes ne suffit pas. Elles disposent de leurs propres ressources humaines et financières qu’elles doivent mettre au service de la recherche d’un niveau d’enseignement supérieur à celui de leurs nombreux concurrents afin de se distinguer et de bénéficier d’une position dominante sur un marché attractif.
Après avoir étudié les différentes spécificités du secteur de l’enseignement privé, et plus particulièrement celles des programmes américains implantés en France, nous allons analyser la place qu’y occupe la New-York University de Paris et nous nous intéresserons plus particulièrement aux enjeux de gestion des ressources humaines qu’elle rencontre.
La New York University est un établissement de rayonnement mondial, dont le campus parisien n’est qu’une petite antenne. Ce rayonnement est à la fois un atout pour le programme parisien car il lui permet de bénéficier d’une renommée importante et de ressources précieuses, mais c’est également une source de pression intense car il doit répondre aux exigences du siège et que nombre de ses stratégies sont dictées par lui. Ce poids hiérarchique est d’autant plus pesant que les lois sont très différentes en France et que d’un pays à l’autre les traditions de l’enseignement sont presque antagonistes. Ainsi, si NYU Paris dispose d’une certaine autonomie financière grâce à l’allocation d’un budget conséquent qu’elle est libre d’affecter comme elle le désire, elle reste entravée dans ses stratégies par la vision et les valeurs du siège new-yorkais.
Ce poids hiérarchique se révèle être un important fardeau notamment dans la gestion des ressources humaines, car le capital humain de NYU Paris diffère en de nombreux points de celui de New York et ses attentes ne sont pas toujours compatibles avec la politique du siège.
Le capital humain de NYU Paris s’articule autour de 3 départements [3]:
1. Le département administratif qui regroupe les fonctions financières, comptables, administratives et RH;
2. Le département académique qui regroupe le corps professoral et les responsables des programmes. Ce département mène une réflexion stratégique sur l’évolution des programmes dans l’optique d’attirer un maximum d’étudiants, de conserver le niveau d’excellence et pour satisfaire le siège de New-York;
3. Le département Student Life qui s’occupe du bien-être des étudiants et de leur intégration. Ce département est une spécificité de NYU Paris, il s’intègre à la conception américaine de l’éducation selon laquelle les étudiants sont de véritables clients dont il faut veiller à la satisfaction. Il permet aux étudiants qui se retrouvent loin des Etats-Unis, souvent pour la première fois, de s’intégrer dans leur nouvelle école et de découvrir la ville. Le département organise donc de nombreux événements et reste très à l’écoute des besoins et des envies des étudiants. Beaucoup des membres de ce département sont des professeurs qui s’impliquent encore davantage aux côtés de leurs élèves.
NYU Paris est caractérisé par de nombreux aspects qui la différencie des autres établissements d’enseignement supérieur privés implantés dans la capitale. Nous intéresserons à deux de ces spécificités, structurantes de sa gestion des ressources humaines. Tout d’abord, le campus parisien bénéficie de certaines ressources de son siège américain qui lui permettent de fidéliser efficacement son capital humain. En effet, les moyens financiers importants dont il dispose lui permettent de mettre à la disposition de ses professeurs tout ce qui est nécessaire à l’exercice de leurs fonctions. La facilité d’enseignement, l’environnement favorable, la liberté d’action et la richesse des moyens mis à la disposition des enseignants sont autant de facteurs de fidélisation du corps professoral.
NYU Paris voit entrer de nouveaux professeurs chaque année mais très peu d’entre eux en repartent. Le campus grossissant leur permet de dispenser de plus en plus de cours tout en intégrant les nouvelles recrues. Ainsi, depuis son arrivée il y a maintenant près de deux ans, la directrice des ressources humaines n’a été le témoin que de deux départs, dont l’un à la retraite.
Une autre spécificité de NYU Paris, autour de laquelle se structurera notre problématique, est son absence de service de gestion des ressources humaines jusqu’en 2014. En effet, avant l’arrivée de la directrice des ressources humaines, NYU Paris ne comptait qu’un directeur financier responsable du recrutement et de la rémunération de l’ensemble des salariés.
L’absence de gestion concrète des ressources humaines était rendue possible par la petite taille de NYU Paris et par l’ambiance familiale qui y régnait et qui évitait aux conflits d’émerger. Cependant, face à l’agrandissement du programme et au nombre croissant de salarié, la création d’un département de gestion des ressources humaines s’est imposée comme nécessaire [4].
Face à ces nombreuses spécificités et plus particulièrement face à la situation particulière que constitue l’absence totale de gestion des ressources humaines, notre questionnement s’est orienté sur les modalités de la création d’un service RH et sur la possibilité de conserver une culture familiale parallèlement à cette création. Nous avons donc formulé la problématique suivante: quels sont les principaux enjeux de l’élaboration d’une stratégie RH au sein d’un établissement d’enseignement privé tel que NYU Paris?
Les solutions apportées par l’entreprise : l’élaboration d’une politique RH dans une entreprise à la culture familiale. Au printemps 2014, NYU Paris a fait peau neuve en déplaçant son campus de l’hôtel particulier rue de Passy qu’elle occupait depuis 1974, aux anciens locaux de l’ESTP situés au cœur du quartier latin, le centre historique et intellectuel de la capitale. Cette nouvelle localisation répond aux nouveaux besoins de l’établissement en plein essor. Ce déménagement s’est accompagné d’une autre mutation majeure. En effet, le 6ème étage du nouveau bâtiment accueille désormais un service de gestion des ressources humaines, service dont NYU Paris ne disposait pas jusqu’à lors [5]. Nous allons ainsi nous intéresser à l’élaboration de la stratégie de ce nouveau service, à ses modalités, ses principaux enjeux et les barrières qu’elle a pu rencontrer.
La première étape dans l’élaboration du département des Ressources Humaines a davantage été dictée par des obligations légales que par une véritable stratégie de NYU. Il a d’abord été nécessaire de lire la convention collective de 2007 qui n’avait pas été appliquée lorsqu’elle avait été étendue.
L’application de la convention collective s’est heurté à un triple enjeu, réussir à mêler les lois françaises, les revendications des salariés et les souhaits et directives du siège de New York. La convention collective a trois objectifs principaux ; lister les conditions d’emploi et de travail, encadrer la formation professionnelle et informer les salariés sur la protection sociale dont ils peuvent bénéficier. L’application de cette convention a soulevé de nombreuses questions notamment quant aux nouvelles réglementations qu’elle implique et qui pourraient remettre en cause l’ambiance familiale caractéristique de NYU Paris. La relecture de la convention collective s’est effectuée en collaboration avec le siège new-yorkais, pleinement conscient de la nécessité de l’application mais également du fait que le campus parisien n’avait pas les moyens de la mettre en place par lui même.
Le secteur de l’enseignement privé est un secteur tout à fait spécifique. Et d’autant plus pour la New York University puisqu’il s’agit d’une université américaine implantée en France. Ainsi, la redéfinition du statut des professeurs était un des points prioritaires de l’élaboration de la politique de gestion des ressources humaines.
En effet avant l’arrivée de la directrice des ressources humaines, les professeurs étaient embauchés en CDD d’usage. L’utilisation de ces CDD est l’une des caractéristiques du secteur de l’enseignement, ils sont à la fois synonyme de souplesse pour l’employeur, car ils bénéficient d’un régime simplifié et qu’ils peuvent être renouvelés indéfiniment, et parallèlement source de précarité pour le salarié. Le régime de ces CDD est spécifique et dérogatoire à certaines règles légales, ainsi la date de fin du CDD peut être imprécise, il ne prévoit pas de prime de précarité et il est possible d’embaucher le même salarié au même poste par des CDD successifs sans nécessité d’attente entre leur conclusion. Le recours au CDD d’usage constituait donc d’un bon effet de levier pour la direction, et lui permettait de répondre à une problématique spécifique de NYU Paris. En effet, le nombre d’étudiants est très variable d’un semestre à l’autre, et il arrive que certains professeurs se retrouvent avec seulement cinq étudiants dans leur cours, sans que l’on puisse prévoir si le cours enseigné pourra être maintenu l’année suivante. Les CDD d’usage permettent donc à NYU de faire correspondre le corps professoral avec la demande étudiante sans encourir le risque d’avoir des professeurs sans étudiants. Cependant, ces CDD particuliers mettaient les professeurs dans un situation précaire, dans la mesure où ils n’étaient pas certains de se faire réembaucher à l’issu d’un semestre et qu’il ne pouvaient de ce fait pas se projeter au sein de l’université.
Face à ce dilemme, la directrice des ressources humaines a choisi d’arrêter l’application des CDD d’usage, afin de proposer aux professeurs des CDI. Ce choix fut notamment motivé par l’amélioration des conditions de travail des professeurs et leur revalorisation qu’il permettait. Le CDI permet d’établir un engagement à long terme avec le professeur, il s’agit donc pour l’université d’envisager une collaboration pérenne avec ses salariés et de leur offrir des perspectives d’avenir en son sein. De plus, la proposition de CDI permet à NYU d’obtenir la reconnaissance de ses professeurs qui peuvent désormais bénéficier d’une sécurité plus importante, d’accéder au crédit… Cependant, si ce changement a permis aux professeurs de bénéficier d’une plus grande stabilité de l’emploi, il n’est synonyme ni de garantie d’emploi à vie, ni même d’emploi à plein temps comme le souhaitaient de nombreux professeurs.
Parallèlement, si cette décision est source de stabilité pour les professeurs, elle est également source de rigidité pour la direction. En effet, le régime du CDI est bien plus contraignant que celui des CDD. Il est donc plus difficile pour elle de garantir l’adéquation entre les ressources humaines engagées et les besoins de l’université, car la pérennité des CDI se heurte au caractère éphémère des effectifs étudiants. De plus, pour mettre fin à un CDI l’employeur n’a pas d’autres choix que de recourir à la procédure de licenciement, qui est lourde et qui peut se révéler couteuse pour l’employeur. Cependant, NYU Paris bénéficie là encore d’une de ses spécificités. Ainsi, cette petite structure comptant une cinquantaine de professeurs peut tabler sur la fidélité de ses professeurs qui, ravis d’y travailler, sont en demande d’heures de cours supplémentaires. Enfin, elle bénéficie encore de son ambiance familiale qui lui évite de nombreux contentieux salariaux.
Ainsi, cette modification de la nature des contrats conclus avec le corps professoral, a été facilitée au sein de NYU Paris et permet à la direction de renforcer encore davantage ses relations avec les professeurs en répondant à nombreuses de leurs préoccupations.
La modification du statut des enseignants revêt un deuxième aspect, celui de leur requalification en «professeurs cadres». La principale conséquence de ce changement de statut est la modification du système de cotisation des retraites. En effet, les cadres cotisent davantage chaque année, auprès de l’AGIRC, et profitent d’une retraite plus confortable par la suite. La création de ce nouveau statut s’est heurtée à la réticence de certains professeurs pour lesquels le net qu’ils perçoivent chaque mois est plus important que leur retraite à venir. Face à cette résistance, la direction a décidé de laisser libre l’accès à ce statut aux professeurs déjà en poste qui cotisaient dans le système de retraite des non cadres depuis de nombreuses années. Cette décision a permis de mettre en place ce nouveau statut de manière plus conciliante afin d’éviter de faire éclater des conflits sociaux dans une structure qui souhaite conserver sa culture familiale.
Les professeurs ont désormais le choix, ils peuvent garder leur statut de non-cadre comme ils peuvent accéder à celui de cadres et à ses avantages et inconvénients. Cependant, le statut de cadre sera imposé aux futurs professeurs qui seront embauchés postérieurement à la mise en place de cette mesure.
Suite à la création d’un statut spécifique pour les professeurs, la problématique de leur rémunération, là encore spécifique à l’enseignement, s’est imposée comme fondatrice de la nouvelle stratégie RH. Elle est spécifique dans ce secteur dans la mesure où une heure de cours dispensée aux élèves nécessite une préparation de plusieurs heures en amont et également en aval. Cette spécificité est encore plus vraie dans l’enseignement supérieur car les professeurs donnent des cours sur mesure en fonction des demandes de la direction. La valorisation de ces heures de travail induites est un enjeu clé de la stratégie RH d’un établissement comme NYU Paris dans la mesure où elles ne permettent pas aux professeurs de donner plus d’une quinzaine d’heures de cours par semaine et ont de ce fait un impact important sur leur rémunération. La politique RH nouvellement élaborée a donc mis un point d’honneur à valoriser ces heures induites afin de rémunérer les professeurs «à leur juste travail et à leur juste valeur».
En rémunérant les heures de travail induites, NYU Paris s’est imposée comme précurseur parmi les établissements d’enseignement privé. En effet, seule l’American University of Paris avait mis en place un tel système, permettant au professeur de bénéficier d’un système de rémunération en adéquation avec le travail qu’ils fournissent. Cette position de précurseur constitue un avantage mais fait également émerger de nouvelles interrogations. L’avantage indéniable de cette situation repose sur l’attractivité de cette mesure pour les professeurs. En effet, NYU Paris propose désormais un schéma de rémunération plus avantageux que ceux de la plupart de ses concurrents directs, qui lui permet de ce fait de se positionner en leader pour le recrutement des professeurs. Parallèlement, cette absence de benchmark constitue une difficulté supplémentaire dans la mise en place de cette politique de rémunération. En effet, définir combien d’heures de travail nécessite réellement une heure de cours est extrêmement compliqué. Ceci tient notamment au fait que les professeurs sont dans des situations très différentes, que la diversité des matières crée une infinité de situations et qu’évidemment chacun d’entre eux veut faire valoir la sienne.
Cette nouvelle politique de rémunération a été élaborée entre la direction et les délégués du personnel qui faisaient le lien avec les professeurs. L’intégration du corps professoral dans la discussion a été une priorité pour la direction, qui a la particularité d’enseigner elle-aussi, mais a complexifié le processus de prise de décision. A la suite de nombreux allers et retours, il a été décidé de ne pas faire de différence entre les matières mais plutôt de rémunérer différemment l’enseignement «undergraduate» qui correspond à un niveau de licence et l’enseignement «postgraduate» qui équivaut à un niveau master.
En plus de reconnaitre que le temps de travail des professeurs n’étaient pas seulement celui passé devant les étudiants en rémunérant les heures de travail induites, la politique de rémunération de NYU Paris s’attache également à tarifer un grand nombre d’activités que font les professeurs en marge de leur enseignement. Ainsi, de l’accompagnement aux voyages scolaires jusqu’à la direction de mémoire, l’ensemble des activités aux côtés des étudiants qui ne sont pas à proprement parler de l’enseignement sont désormais rémunérées.
Au travers de la mise en place de cette nouvelle politique de rémunération, NYU Paris entend s’imposer comme un établissement attractif pour les professeurs car valorisant chaque aspect de leur profession et non plus seulement les heures de cours dispensées.
La nouvelle stratégie RH de NYU Paris s’articule également autour d’une politique de recrutement garante de l’excellence académique qui a forgée la réputation de l’établissement. Chaque année, l’université recrute de nouveaux professeurs au travers d’un processus particulier dont nous allons étudier les différents aspects. Tout d’abord, il est nécessaire de s’intéresser au mécanisme d’identification des candidats. Ce processus est l’une des spécificités de NYU car il s’effectue entièrement en réseau. En effet, l’université dispose d’un important réseau de professeurs à New York mais également à Paris, qui lui permet de rencontrer des candidats sans avoir besoin de passer d’annonce. Ainsi, lorsqu’un poste est à pourvoir, la direction, les professeurs mais également le siège de New York sont en mesure de trouver des candidats en adéquation avec la position. Ce système est un véritable atout, tout d’abord il permet de sélectionner des professeurs qui correspondent au niveau d’excellence de l’université, il permet également d’accéder à des profils internationaux, mais il permet avant tout à NYU de bénéficier d’un accès prioritaire sur une ressource très rare [6]. En effet, la directrice des ressources humaines a insisté sur le fait que si pour certains postes, les candidats se battent à la porte de l’université pour y enseigner, pour d’autres, il est compliqué de trouver des candidats potentiels. Cette difficulté tient au fait que l’université demande des profils très spécifiques pour dispenser des cours particuliers.
Face à la rareté des profils recherchés, le réseau de NYU apparait donc comme une ressource essentielle. Une fois les candidats identifiés, encore faut-il qu’ils satisfassent les exigences de l’université. Et ces dernières sont élevées. En effet, l’établissement requiert le plus haut diplôme qui existe dans chaque matière à enseigner.
Cette exigence est également l’une des nouveautés apportées par la création du service des ressources humaines. En effet, jusqu’à lors, les professeurs n’étaient soumis à aucune exigence spécifique. Cette nouvelle politique a été compliquée à mettre en place car certains professeurs en exercice depuis de nombreuses années n’avaient pas de doctorat ou de diplôme équivalent. Il était de ce fait complexe de leur faire accepter le fait que ce n’était plus possible alors même qu’ils avaient fait preuve de leur capacité sans que l’institution n’ait de reproches à leur faire. Cependant, cette exigence est le reflet du niveau d’excellence que l’université entend donner à son enseignement et transmettre à ses élèves. Il était donc indispensable de mettre en place une véritable politique de recrutement fondée sur un critère d’exigence très élevé. Au delà de ce critère, l’université ne définit pas un profil idéal de professeur, elle reste en fait très ouverte à la diversité qui constitue l’une de ses plus grandes ressources au service de son caractère international.
En France, il existe des organismes les OPCA, auprès desquels toute entreprise doit cotiser. Ces contributions financières sont ensuite consacrée à la formation continue de leurs salariés. Jusqu’à la création d’un service RH en son sein, NYU Paris cotisait auprès des OPCA mais n’utilisait pas les opportunités formatrices qui en résultait. A son arrivée en 2014, la directrice des ressources humaines a fait de la formation, et notamment de l’exploitation des ressources des OPCA, une de ses priorités. Cette problématique de formation, nous renvoie une fois de plus à la spécificité de l’entreprise étudiée. En effet, le corps professoral est composé majoritairement de littéraires, qui n’ont pour seule image du droit social que celle véhiculée par la presse et qui ont de ce fait tendance à fantasmer les possibilités qu’offre une gestion des ressources humaines. De plus, cette population fait preuve d’une immense ouverture d’esprit et d’une volonté d’apprendre irrépressible, elle est de ce fait sans cesse en demande de formations très éclectiques. La spécificité de la formation dans l’enseignement supérieur privé, a grandement complexifié la tâche du service RH. En effet, il est difficile de trouver des formateurs pour les professeurs de NYU, premièrement parce qu’ils enseignent des matières très spécifiques, mais également parce que c’est un métier complètement oublié en France car les établissements publics gèrent leur formation continue en interne.
Parallèlement, en matière de formation, les professeurs sont sans cesse en demande de nouvelles possibilités sans que celles-ci ne soient toujours en rapport avec la matière qu’ils enseignent au sein de NYU. Ce phénomène, loin de s’atténuer, s’est au contraire amplifié suite aux efforts fournis par la nouvelle direction des ressources humaines, car les professeurs qui avaient jusque là été privés de formation entrevoyait désormais la possibilité d’assouvir leur curiosité. Face à ces demandes, de plus en plus nombreuses, la responsable de la politique RH refuse de fermer les portes à toute discussion. Ainsi, elle est la première à accueillir les professeurs en demande de formation et à leur interdire de se censurer. Elle souhaite que chacun puisse être en mesure d’exposer ses souhaits bien qu’elle ne soit évidemment pas en mesure de tous les satisfaire. Selon elle, laisser sa porte ouverte aux envies de chacun est non seulement important pour que les professeurs se sentent entendus et reconnus au sein de l’université, mais c’est également nécessaire au fonctionnement de cette dernière car cela permet de faire émerger des idées auxquelles la direction des ressources humaines n’aurait pas pensé et qui peuvent se révéler précieuse pour l’évolution de l’enseignement. Le mot d’ordre de la gestion des ressources humaines de NYU est dès lors : «ne vous censurez pas». De toute évidence toutes les envies ne pourront pas être comblées mais chacune d’entre elles méritent d’être entendues.
Cette politique très ouverte à la discussion est un véritable atout dans la mesure où les professeurs, même s’ils ne peuvent finalement pas effectuer la formation qu’ils souhaitaient, se sentent écoutés, ils ont l’impression de faire partie intégrante de l’entreprise et de participer à son amélioration. Cependant, la directrice des ressources humaines reste encore insatisfaite des formations qu’elle est en mesure de proposer et souhaite continuer à améliorer son offre. La formation est selon elle un élément essentiel de la politique RH qu’elle doit mener car elle permet de développer le capital humain de NYU en adéquation avec sa volonté de demeurer une institution d’excellence.
En matière d’évaluation, la spécificité de l’enseignement est également mise en exergue. En effet, il est difficile de mettre en place des entretiens annuels avec les professeurs comme on le fait avec les autres populations de salariés. Ces entretiens annuels ont pour objet principal de discuter de l’évolution du salarié, d’envisager ses perspectives de carrières ou encore de fixer de nouveaux objectifs. Cependant, l’évolution des professeurs reste très limitée, ceux-ci une fois en poste au sein de NYU ont très peu de perspectives d’évolution car ils ont déjà atteint le statut de professeur-cadre qui constitue pour la plupart d’entre eux le point culminant de leur carrière. Même si certains d’entre eux auront l’opportunité d’intégrer le service administratif voire d’accéder aux fonctions de direction, la majorité des enseignants reste au même poste tout au long de leur carrière à NYU Paris. Et ce manque de perspective est caractéristique du secteur de l’enseignement, il est en effet difficile pour les professeurs d’évoluer de la même manière que les autres populations de salariés. Cependant, NYU Paris a décidé de favoriser la communication avec les professeurs qui le souhaitaient en leur offrant la possibilité d’effectuer des entretiens réguliers avec la direction même si différents des entretiens professionnels classiques. Ainsi, elle met à l’honneur la communication entre les départements académique et administratif, afin de discuter non seulement de ce qui fonctionne et de ce qui fonctionne moins bien, de ce qui est attendu des professeurs, mais également afin de recueillir leurs impressions, leurs désirs et leurs revendications en termes de rémunération, de formation. La mise en place de ces conversations régulières permet de garder les professeurs motivés et performants dans leur travail.
NYU Paris se distingue également par une autre modalité d’évaluation des professeurs. En effet, ses enseignants sont évalués par leurs propres élèves. Ce système est un excellent moyen de maintenir une motivation des professeurs dans la mesure où il leur impose de se remettre continuellement en question, d’essayer de modifier leurs méthodes d’enseignement afin de mieux satisfaire leurs étudiants. De plus, les notes des élèves sont publiées sur le site de l’établissement et les futurs étudiants choisissent leurs cours en fonction d’elles. En sachant que le maintien des cours de chaque professeur dépend du nombre d’étudiants qui s’y inscrivent, cette forme de notation s’avère être un véritable moyen de les stimuler et de les garder investis dans leur mission d’enseignement.
Cependant, NYU Paris se garde de tomber dans les travers de ce mode d’évaluation qui reste très informel et subjectif. De ce fait, l’administration refuse de se servir de la notation des élèves comme base d’évaluation de la performance réelle des professeurs. De plus, seule l’appréciation générale est retenue afin d’éviter de donner trop d’importance à une note isolée, pouvant relever d’un conflit personnel entre le professeur et l’élève. Ce système d’évaluation unique est une richesse que NYU Paris tire de sa culture américaine et qui lui permet de pallier, dans une certaine mesure, la difficulté de l’évaluation du corps enseignant.
Il est important de distinguer deux types de mobilité : la mobilité à l’intérieur même du campus parisien, et la mobilité internationale, entre les différents campus de NYU.
Au sein de l’antenne parisienne de la NYU, il existe très peu de perspectives d’évolutions de carrière. En effet, NYU Paris est une petite structure au sein de laquelle le turnover est limité tout comme la création d’emploi. Les professeurs en place restent en général au même poste durant toute la durée de leur carrière au sein du campus. Un enseignant peut difficilement envisager d’être autre chose qu’enseignant. Il n’existe pas de réelle opportunités d’évolution pour eux.
Pour pallier cette paralysie des postes, la directrice des ressources humaines a décidé d’instaurer une politique d’ouverture de tous les postes. Ainsi, les annonces concernant les postes à pourvoir sont affichées au sein du campus et chaque salarié, professeur comme administrateur, peut poser sa candidature. Cette stratégie d’ouverture est fortement empreinte de la culture américaine, dans laquelle les compétences de base des salariés ne définissent pas de manière limitative sa fonction dans l’entreprise. Elle permet également de faire émerger de nouveaux potentiels, car certains ont des compétences insoupçonnées, qui peuvent se révéler précieuses pour l’entreprise.
Depuis sa création, il y a maintenant bientôt deux ans, le service de gestion des ressources humaines de NYU Paris a élaboré de nombreux aspects d’une véritable stratégie RH. Cependant de nombreuses obligations pèsent encore sur la direction du service, comme la mise en place d’un règlement intérieur. De plus, la création de la toute nouvelle politique de gestion des ressources humaines de NYU Paris est rendue difficile par la nécessaire conciliation des obligations légales françaises, de la stratégie globale du siège américain de NYU et des revendications des professeurs. Il reste encore beaucoup à faire, et l’élaboration de la stratégie demande d’autant plus de temps qu’elle doit s’adapter à une institution où la culture RH était jusqu’à lors inexistante.
Commentaires, critiques et recommandations. Suite à l’étude de la politique RH proposée par NYU Paris, nous avons été en mesure d’identifier des points nécessitants des améliorations et d’autres qui doivent encore être créés.
Les ressources Humaines ont développé un véritable statut pour les professeurs notamment en leur offrant des CDI et en les qualifiants de cadres. Ces mutations ont permis aux professeurs de bénéficier d’une stabilité plus importante de leur emploi. Cependant, cette avancée reste encore insuffisante aux yeux de nombreux membres du corps professoral, qui subissent encore la pression de la précarité. En effet, certains d’entre eux donnent des cours très spécifiques qui n’attirent pas toujours assez d’étudiants pour être maintenus.
Pour pallier l’insécurité qui subsiste d’un semestre à l’autre, et ce malgré la mise en place des CDI, il est nécessaire de réaliser une meilleure anticipation des futurs effectifs des différents cours, par exemple en rendant obligatoire l’inscription des étudiants plus à l’avance. Ceci permettrait aux professeurs de s’organiser professionnellement et personnellement et leur éviterait de ses retrouver dans la situation délicate de ne pas avoir suffisamment d’heures de cours à dispenser. Parallèlement, il est important de s’interroger sur les raisons de l’attractivité de certains cours par rapport à d’autres. Il pourrait donc être intéressant de tenter de promouvoir certains cours, moins affectionnés par les élèves, afin de mieux répartir les effectifs. Ceci pourrait se faire au travers du développement de la visibilité de ces cours sur le site internet du campus et auprès des advisors, les conseillers d’orientation des futurs étudiants, en mettant en avant les bons retours des précédents étudiants ayant suivi ces cours. Enfin, face à l’impopularité de certains cours, il est nécessaire de s’interroger sur leur possible renouvellement. En effet, l’actualisation de leur contenu, la modification de leur méthode d’enseignement ou encore de leur mode d’évaluation pourrait leur permettre de reconquérir le cœur des étudiants.
En évitant de conserver des cours qui ne correspondent pas aux attentes des étudiants ou qui ne leur sont pas bien « vendus », NYU Paris favoriserait la stabilité de l’emploi des professeurs en garantissant au maximum les effectifs de chaque matière.
Le service de gestion des ressources humaines a, dans le cadre de l’élaboration de sa stratégie, négligé un aspect important du travail de ses professeurs qui méritent pourtant d’être valorisé. En effet, nombreux d’entre eux se livrent, en parallèle de leur enseignement au sein de NYU Paris, à diverses activités qui sont précieuses pour l’institution, telles que les recherches, les publications, les expositions ou encore la soutenance de thèses. Malheureusement, la direction RH n’a pas encore su y apporter l’intérêt qu’elles méritent dans la mesure ou elles contribuent au rayonnement de l’établissement.
Afin de tirer pleinement profit des travaux réalisés par les professeurs en dehors de leurs cours, NYU Paris pourrait les mettre en avant afin qu’ils contribuent activement à la promotion de l’image d’excellence de NYU en France. Pour ce faire, l’institution pourrait offrir la possibilité aux professeurs d’utiliser ses locaux comme lieu privilégié d’exposition qu’elle pourrait alors ouvrir au public afin de toucher un public le plus large possible. De même, elle pourrait activement prendre part à la promotion des publications de ses professeurs ou de l’ensemble de leurs œuvres artistiques. Enfin, elle pourrait également soutenir certains de ces travaux en leur offrant des possibilités de financement. La prise en compte des activités annexes des professeurs aurait un avantage mutuel pour la direction et les professeurs. En effet, d’un côté NYU bénéficierait ainsi d’une plus grande visibilité dans des domaines très divers et de l’autre les professeurs se sentiraient plus valorisés et intégrés dans le fonctionnement l’institution et dans son rayonnement.
A ses débuts, le campus de New York University à Paris revêtait les caractéristiques d’une organisation familiale. Les professeurs se connaissaient tous et se voyaient très fréquemment. Mais son expansion a considérablement réduit cet aspect familial, notamment par l’instauration d’une structure plus hiérarchique imposant davantage de règles et de restrictions. Les anciens professeurs ont vu leur liberté d’action diminuer. Parallèlement, le déménagement de NYU Paris dans un campus plus vaste a terminé de détruire cette ambiance conviviale, puisque les salariés ne se croisent désormais que très rarement dans les couloirs, et qu’il n’existe pas de réel lieu de détente propice à l’échange entre ces derniers.
Si jusqu’à lors, NYU Paris s’est attaché à rétablir la communication entre les professeurs et l’administration en les intégrant au maximum dans les prises de décision et en leur offrant la possibilité d’échanger régulièrement, il est maintenant nécessaire qu’elle se consacre au rétablissement de la cohésion au sein du corps professoral et de l’ambiance familiale qui y régnait. Développer la cohésion entre les salariés est un enjeu majeur de gestion des ressources humaines car cela permet de les impliquer davantage et de participer à l’élaboration d’un cadre de travail agréable. Ceci pourrait prendre de nombreuses formes. Tout d’abord, il faudrait organiser, de manière régulière, des événements permettant l’échange entre les professeurs et multipliant les conversations informelles. Ces événements pourraient prendre des formes variées allant de simple déjeuner entre collègues à des cocktails et des sorties culturelles. La communication entre les professeurs pourraient également être favorisée au travers même de leur enseignement. En effet, il pourrait être intéressant de mettre en place des partenariats entre les professeurs en développant des projets pluridisciplinaires. Ainsi, les professeurs travailleraient en collaboration et pourraient nouer des relations plus solides que ce que permet des enseignements individuels. L’organisation de sorties culturelles avec les étudiants ou encore de voyage scolaire est également source d’opportunité de partage entre les membres du corps professoral. Enfin, il pourrait être envisagé d’aménager des espaces de détentes collectifs ou pourraient se retrouver les salariés dans une ambiance informelle. Il s’agit en fait de recréer les opportunités d’échange qui constituaient la force de NYU Paris à ses débuts, de rétablir sa culture familiale afin que les professeurs aient autant de plaisir à venir travailler qu’autrefois.
L’université de New York bénéficie largement de l’étendue de son réseau international, et la présence de ses campus dans de nombreuses villes à travers le monde est pour elle un atout indéniable. Cependant, les salariés ne profitaient pas pleinement des opportunités que ce réseau peut créer. En effet, les possibilités de mobilité entre les campus, si elles sont favorisées pour les étudiants, ne sont pas du tout ouvertes aux professeurs. Ceci s’explique notamment par la spécificité du secteur de l’enseignement privé, secteur dans lequel les enseignants sont majoritairement pluri-employeurs. Certains d’entre eux ne donnent à NYU Paris qu’une poignée d’heures de cours par semaine et cumulent les heures dans d’autres établissements. Ceci rend difficile leur mobilité, car il n’est pas toujours avantageux pour eux d’abandonner leurs heures de cours auprès de leurs autres employeurs pour changer de campus de NYU. Cette rigidité est extrêmement dommageable pour les professeurs avides d’expériences à l’étranger, tant d’un point de vue personnel que professionnel. Ainsi, NYU ne parvient pas à convertir son réseau international en opportunités réelles pour ses enseignants.
Pour pallier cette rigidité, il pourrait être intéressant de concevoir un système d’échange pour les professeurs, sur le modèle des échanges Erasmus consacrés aux étudiants. Sur la base du volontariat, les professeurs auraient ainsi la possibilité d’aller enseigner pour un semestre ou une année au sein des autres campus de NYU. Ce système d’échange devrait également prévoir un nombre d’heures d’enseignement suffisant pour qu’il ne soit pas financièrement préjudiciable pour les professeurs de renoncer aux heures effectuées à Paris auprès d’autres employeurs. La courte durée de ces échanges permettraient également aux professeurs de découvrir les différents campus et pourraient même déboucher sur des mobilités à long terme si les professeurs souhaitent finalement ne pas rentrer à Paris. Parallèlement, des professeurs des autres campus viendraient enseigner à NYU Paris. Ce mécanisme d’échange serait doublement bénéfique. En effet, il permettrait à la fois aux professeurs de bénéficier d’une expérience internationale et aux élèves de profiter de l’enseignement de professeurs aux profils plus différents et aux méthodes d’enseignement variées.
En termes de formation, NYU Paris reste encore en retard. En effet, malgré ses efforts, et les progrès effectués depuis la création du service de gestion des Ressources Humaines, les professeurs sont encore majoritairement insatisfaits des opportunités de formation qui leur sont proposées. Ceci tient notamment au fait que dans le secteur de l’enseignement, et encore plus dans celui de l’enseignement privé, il est très difficile de trouver des formateurs adéquats dans la mesure où certains cours sont très spécifiques.
Afin de contourner cette difficulté, nous avons pensé qu’il serait possible de mettre en place un système de formation interne à NYU. En effet, de par sa taille, l’université bénéficie d’un corps professoral très étendu et beaucoup d’entre eux enseignent les mêmes matières. Il serait donc intéressant de concevoir un système de formation sous forme de coaching entre les professeurs, pour favoriser un enrichissement mutuel. Ce système de coaching pourrait être international et mettre en relation des professeurs des différents campus spécialisés dans les mêmes enseignements. Parallèlement, il pourrait être intéressant d’organiser des séminaires de formation présidés par les enseignants les plus qualifiés qui feraient ainsi bénéficier de leur expertise le reste du corps professoral.
L’instauration d’une stratégie RH dans une entreprise qui en était dépourvue n’est pas une chose aisée. Tiraillée entre ses origines américaines et la nécessité de s’adapter à la législation française, NYU Paris a dû passer par une phase de transition difficile, entre l’ancien modèle de gestion des ressources humaines et celui qui se met en place progressivement aujourd’hui. Contrainte de répondre à des exigences d’excellence dans un secteur d’activité très particulier où la concurrence est élevée, la nouvelle direction s’est attelée à révolutionner la politique RH du campus parisien. Tout en essayant de combler les attentes de chacun de ses salariés, la directrice des Ressources Humaines a adopté des mesures fortes comme l’application de la convention collective, la redéfinition du statut des professeurs ou bien la rémunération du travail induit afin de mieux protéger les employés contre d’éventuels abus. Il s’agissait de leur faire comprendre, malgré un manque cruel de culture RH, qu’ils disposaient de droits et de devoirs en la matière.
NYU Paris vit donc, depuis environ deux ans, un grand bouleversement de sa politique de gestion des ressources humaines et il reste encore beaucoup d’éléments à améliorer, des éléments qui relèvent parfois de l’obligation légale comme le règlement intérieur par exemple. Evidemment c’est un processus qui nécessite du temps et de nombreux points peuvent encore être parfaits, comme nous avons pu le voir dans les différentes recommandations que nous avons émises. Accorder des CDI aux professeurs ne leur a pas pour autant garanti la sécurité de l’emploi, ils restent tributaires du nombre d’élèves dans leur classe, la communication peut être largement améliorée car celle-ci s’est dégradée depuis que le campus a déménagé dans de nouveaux locaux, la mobilité internationale enseignante est au quasi point mort.
Ainsi NYU parvient petit à petit à concilier les aspects légaux, humains et stratégiques de la gestion des ressources humaines. La création d’un véritable service dédié à cette gestion a constitué le premier pas dans la prise en compte du capital humain, et l’institution semble maintenant être en mesure de transformer l’essai.
References
- Jean-Marie Peretti. Dictionnaire des ressources humaines. Vuibert, 7e édition, 2015. 288 pages
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- Huguette Bernard. Comment évaluer, améliorer, valoriser l’enseignement supérieur? Broché, 2011. 141 pages
- Jessica Gourdon. EducPros.fr by l’Etudiant. À Paris, la New York University déménage et lance une clinique du droit. [En ligne] Disponible sur : http://www.letudiant.fr/educpros/actualite/a-paris-la-new-york-university-demenage-et-lance-une-clinique-du-droit.html
- Ministère de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Évaluation administrative des personnels enseignants et d’éducation par les chefs d’établissement, Décembre 2015 [En ligne] Disponible sur : http://www.esen.education.fr/fr/ressources-par-type/outils-pour-agir/le-film-annuel-des-personnels-de-direction/detail-d-une-fiche/?a=27&cHash=ff2f5770f7